Dans un documentaire de la télé espagnole, Carlos Kameni (35 ans) témoigne du racisme dont il a été victime en Liga. Fort et révoltant.
Auto-critique salutaire en Espagne. Dans “Fútbol y racismo”, la chaîne Movistar revient sur les trop nombreux incidents racistes vus en Liga depuis les années 90, entre laxisme des dirigeants et silence de la presse. Un film dans lequel Carlos Kameni, l’ex (très bon) gardien de l’Espanyol puis Malaga, raconte le cauchemar vécu à 20 ans seulement, sur le terrain du Real Saragosse. “Quand quelqu’un vit une chose pareille, il peut rentrer chez lui et se suicider”, lâche le Camerounais, qui a longtemps refusé de parler d’un combat qu’il pensait “perdu d’avance”.
Kameni sobre los insultos racistas en La Romareda: “Cuando una persona vive una cosa así puede llegar a casa y suicidarse”. pic.twitter.com/YKraAjd1aU
— Fonsi Loaiza (@FonsiLoaiza) January 21, 2020
Ce soir de décembre 2004, Kameni est la cible de cris de singe venus des tribunes, mais aussi de tout jeunes ramasseurs de balle. Sous les yeux de leur camarade noir. “Je ne comprenais pas comment cela pouvait se passer dans un pays comme l’Espagne, se souvient-il. Si on me le fait à 20 ans, imagine ce que c’est pour un enfant de 8 ans”. Dans une époque où la question d’arrêter le match se pose peu, l’ex du Havre arrive toutefois à rester sur le terrain.
Es imposible no sentir nada escuchando a Kameni. Lo que dicen sus ojos, sus palabras…
‘Fútbol y racismo’#LosOtrosDeMovistar pic.twitter.com/Q6u7wyEVvB
— #Vamos de Movistar+ (@vamos) January 21, 2020
“À un moment, j’étais perdu, avoue-t-il. L’arbitre s’est très bien comporté et m’a demandé si je pouvais continuer. Je n’ai vu personne d’autre affecté. À la pause, mes coéquipiers n’osaient pas me regarder. Le mister m’a dit “continue, ne les écoute pas”. Mais j’ai répondu qu’il ne valait mieux pas parler de ça, parce que personne ici ne pouvait comprendre ce que je ressentais. Cela a été dur à surmonter, mais avec le temps j’ai fini par accepter les choses et les voir autrement”. Image tout aussi frappante : les ramasseurs demanderont son maillot au coup de sifflet final.
Récidive à Mestalla
10 ans plus tard, Kameni subit encore. Cette fois, c’est avec Malaga à Mestalla, alors que le match n’a même pas encore débuté. Dans le silence du stade à moitié rempli, les insultes racistes fusent comme cet abject “va te laver” d’un supporter de Valence. “Ça m’a touché parce que c’était un père et son fils. À l’échauffement !”, s’effraie-t-il. Plein de sang froid, Kameni l’appelle à soutenir plutôt son équipe et à avoir un peu d’éducation. “Comment est-ce possible ? Faire ça, devant son fils ? Qu’est-ce que tu lui apprends ?”, s’interroge encore le gardien, désormais libre après son départ de Fenerbahçe.
D’Hiddink à Eto’o
En plus de ce témoignage, “Fútbol y racismo” se replonge dans une Liga des 90’s où un drapeau nazi était toléré dans les stades. Guus Hiddink revient par exemple sur ce jour où il a fait enlever une croix gammée à Mestalla, entraînant la colère de ses dirigeants de Valence. On croise aussi la sortie raciste de l’ex-président de l’Atlético sur son propre attaquant Adolfo Valencia, le traitement réservé par le Bernabeu au gardien nigérian Wilfred, une analyse signée Thuram (normal) ou encore l’épisode Eto’o à Saragosse (encore), où il avait voulu quitter le terrain avant d’être retenu. Impensable aujourd’hui ? Malheureusement non. Et c’est pour ça qu’il faut encore ce genre de docu.
Tuvo que venir Guus Hiddink a darnos una lección. Hijo de una familia de la resistencia holandesa, se negó a comenzar un partido con el Valencia hasta que no se retirara una bandera nazi.#LosOtrosDeMovistar pic.twitter.com/IEQDARfD5s
— #Vamos de Movistar+ (@vamos) January 22, 2020
Sentimos repulsión y vergüenza.
En la España de los 90 quedaban impunes los actos racistas en el fútbol. #LosOtrosDeMovistar pic.twitter.com/Rfsu7RIi4X
— #Vamos de Movistar+ (@vamos) January 21, 2020
Si no intervienes, eres cómplice. Comienza ‘Fútbol y racismo’. #LosOtrosDeMovistar pic.twitter.com/FiOc4oNgmX
— #Vamos de Movistar+ (@vamos) January 21, 2020